EGLISE SYRIAQUE SAINT SEVERIOS

Un peu d'histoire

Il existe plusieurs légendes sur l'origine des Syriaques, dont celle qui raconte qu'ils seraient la treizième tribu perdue d'Israël. Plus vraisemblablement, il s'agit du nom donné aux araméens et assyriens devenus chrétiens. Les Syriaques ont été les habitants de ce croissant fertile, la Mésopotamie. Depuis toujours, ils ont vécu dans des pays comme la Syrie, le Liban, la Jordanie, l'Irak, l'Iran et le sud-est de la Turquie.

Au 14ème siècle avant Jésus Christ, les Araméens formèrent de petits états-nations, comme le royaume de Damas, de Aram-Nahrin, Aram-Sobah et Padan-Aram. Ils imposèrent rapidement leur langue à toute la région et la dirigèrent pendant plus de cinq siècles. Cette suprématie cessa en 732 avant Jésus Christ quand les Assyriens s'emparèrent du royaume de Damas. Cependant, leur langue, l'araméen, continua à jouer un rôle central dans la région jusqu'à l'invasion arabe au 7ème siècle. Cette langue survit encore de nos jours dans des centaines de cités au Moyen Orient (Région du Tur Abdin en Turquie, Nord de la Syrie, en Irak, au Liban).

L'utilisation des termes "Syrie" et "Syriens/Syriaques", pour parler du pays des "Aram" et "Araméens", eut lieu juste avant la naissance du Christ, pendant la période séleucide. A cette époque, le mot "Aram" fut remplacé par "Syrie". Parce que les araméens, devenus chrétiens, avaient complètement adhéré à leur nouvelle religion, ils préférèrent abandonner le nom "Araméen", à connotation trop païenne, pour le mot "Syriaque". Aujourd'hui, les deux termes sont devenus synonymes. On emploie aussi facilement l'un que l'autre, même si le terme "Syriaque" est le plus utilisé.
Concernant l'Eglise cependant, on ne dira jamais "l'Eglise araméenne" mais plutôt "l'Eglise syriaque". Le terme "Eglise syriaque" regroupe toutes les Eglises dont la langue liturgique est, ou a été, le syriaque, et qui ont été, ou sont encore, sous la juridiction du patriarcat d'Antioche (Eglise syriaque orthodoxe, Eglise syriaque catholique, Eglise maronite, Eglise melkite catholique, Eglise melkite orthodoxe, Eglise chaldéenne et Eglise assyrienne).
Les fidèles de l'Eglise syriaque orthodoxe d'Antioche sont répartis aux quatre coins du monde. Cette diaspora, due à des raisons à la fois économiques et ethniques, a vidé progressivement de ses habitants le berceau historique des Syriaques (Turquie, Syrie, Liban, Irak, Jordanie, Palestine, Egypte).

Une première immigration de Syriaques vers l'Inde a lieu au 19ème siècle. Les Syriaques ont émigré ensuite, après le génocide, vers 1920, en Amérique du Sud (Argentine, Brésil, Chili,…). Ensuite une autre vague d'immigration à commencé dans les années 60 vers l'Europe (Allemagne, Autriche, Belgique, France, Pays-Bas, Suède), l'Amérique du Nord et l'Australie. L'Eglise compte plus de trois millions de fidèles, une grosse moitié étant en Inde. A la tête de l'Eglise on trouve sa sainteté Mor Ignatius Zakay I Iwas. Son titre est "patriarche d'Antioche et de tout l'est, chef suprême de l'Eglise syriaque orthodoxe universelle". Il est l'héritier du trône de Saint Pierre. L'Eglise compte aujourd'hui 28 diocèses dont huit sont en Inde, et le reste est dispersé dans tous les pays où les Syriaques habitent.

En Europe, plus précisément, les premières migrations vers l'Europe commencèrent après 1945, tout d'abord principalement aux Pays-Bas, en Allemagne et en Suède. Les émigrations se poursuivirent aussi dans les années 1960. La grande vague d'émigration eut lieu dans les années 1980, et de nos jours les Syriaques sont répandus dans toute l'Europe occidentale. Mais il faut dire que la difficulté de la migration et de la langue du pays d'accueil n'ont guère empêché les Syriaques de pratiquer leur foi selon leurs propres langues, tradition et culture. En effet, si les Syriaques orthodoxes ont survécu jusqu'à aujourd'hui aux crises de l'histoire, s'ils sont restés fidèles à la foi chrétienne de leurs ancêtres, c'est grâce à la Providence, à la main de Dieu qui protège ses enfants.

Par ailleurs, il est bien connu des émigrés syriaques qu'ils se soucient avant tout de construire une maison pour Dieu, avant même de bâtir leurs propres maisons. C'est pourquoi, on trouve qu'ils ont travaillé ardemment et réussi soit à construire soit à acheter des églises. Aujourd'hui ils en possèdent plus d'une centaine dans toute l'Europe (environ une cinquantaine en Allemagne, une quarantaine en Suède, une dizaine aux Pays-Bas, quatre en Belgique et une en France) ; de même, ils se sont approprié trois monastères : Monastère de Saint Ephrem à Losser / Pays-Bas, Monastère de Saint Jacques de Sarough à Warburg / Allemagne, et Monastère de Saint Awgin à Arth non loin de Zurich / Suisse.

Quelques moines et moniales vivent dans chacun de ces monastères qui servent de petits séminaires où les jeunes peuvent recevoir un enseignement traditionnel et apprendre la langue syriaque, tout en suivant leurs études secondaires dans le lycée de l'Etat.

Aujourd'hui, l'Europe est divisée en quatre diocèses syriaques orthodoxes : Diocèse de la Suède et des pays scandinaves, Diocèse Vicariat patriarcal de la Suède, Diocèse Vicariat patriarcal de l'Allemagne et Diocèse de l'Europe centrale qui regroupe les Pays-Bas, La Belgique, La Suisse et la France.

La langue

L'araméen est surtout connu comme la langue du Christ. Cette langue sémitique, originaire de la région du moyen Euphrate, avait essaimé jusqu'en Syrie et en Mésopotamie entre 800 et 600 avant Jésus-Christ. Les inscriptions les plus anciennes parvenues jusqu'à nous sont de cette période et sont écrites en araméen ancien. Sous l'Empire perse, l'araméen devint l'une des langues officielles, dans sa version connue aujourd'hui sous le nom d'araméen biblique. Certains textes de l'Ancien testament (Daniel, Esdras,…) sont écrits dans cette langue. La Peshitto (signifie "simple" en syriaque) est une traduction de la Bible remontant à 100 - 200 après Jésus-Christ.

Après la naissance du Christ, les dialectes araméens furent utilisés comme langue littéraire par des groupes juifs, chrétiens et gnostiques et ils sont encore aujourd'hui la langue liturgique des Juifs et des Chrétiens d'Orient qui se qualifient eux-mêmes de Syriaques avec pour synonyme Araméen mais certains, suite à des influences occidentales, se disent aussi Assyriens, Chaldéens, ou Nestoriens. Ces dialectes se classent en deux branches : l'araméen occidental et l'araméen oriental.

La conquête musulmane allait signer le déclin de l'araméen en tant que langue parlée, au profit de l'arabe. De nos jours, quelque 3 millions de gens parlent encore l'araméen (trois dialectes). Seuls le syriaque et le dialecte de la région d'Urmia ont une forme écrite. La graphie de l'araméen, fondée sur une version de l'alphabet phénicien, a inspiré celles de l'hébreu et de l'arabe qui en sont une variante.

L'étude de l'araméen est importante en linguistique et en philosophie, mais pertinente aussi pour d'autres disciplines en sciences humaines, telles que l'histoire, les études de culture et de civilisation et les études comparées de religion et de littérature. Or, cette langue est menacée d'extinction dans les régions d'où elle est originaire. Il est urgent d'enquêter sur le statut et la situation de cette langue et sur le soutien dont elle a besoin pour se développer et survivre.

Ces dernières décennies, les immigrants ont apporté avec eux l'araméen et ses traditions dans divers pays, mais, dans le même temps, les groupes parlant la langue d'origine ont vu leur nombre diminuer et la transmission de ces traditions aux générations suivantes en a été rendue plus difficile. Pour ceux dont il est la langue maternelle, l'araméen est important à la fois comme forme de communication et comme tradition. De plus, il est essentiel pour des études de théologie dans les domaines du judaïsme, de l'Eglise chrétienne primitive et de l'Islam. Toutefois, actuellement, l'araméen n'a pas de "territoire d'attache" ; il n'existe pas de centre chargé de cette langue.

Le Tur Abdin, berceau des syriaques

Le Tur Abdin n'est pas vraiment ce qu'on peut appeler une montagne. C'est plutôt une arête de 80 kilomètres de longueur qui court de l'ouest à l'est, à cheval sur la frontière entre la Turquie et la Syrie : un plateau élevé et accidenté sur son flanc nord (Turquie) et une plaine basse et plate du côté sud (Syrie). Deux villes importantes délimitaient autrefois chaque extrémité de l'arête. A l'ouest se trouvait Dara, une fortification romaine et à l'est Serwan où le château de Tur Abdin était situé. Au sud, se trouvait Nisibe, une ville célèbre à la fin du quatrième siècle pour son université chrétienne et pour ses mille jardins. Aujourd'hui, elle est située au sud de la Turquie en Haute Mésopotamie et s'étale de Hasankeyf au nord, Nusaybin au sud, Mardin à l'ouest et Cizre à l'est.

En 879 avant Jésus Christ, le roi Assurnasirpal II fait allusion à cette arête en l'appelant le mont Kashiari (Kašiari). A cette époque déjà, c'était une région riche et réputée pour ses vignobles de qualité, son bétail, ses moutons et ses fourneaux à produire du bronze. C'était aussi une région où les armées pouvaient s'approvisionner en vivres abondantes et en matériel lors de leurs campagnes militaires. Les Romains, les Perses, les Grecs, les Turcs et les Kurdes occupèrent à un moment ou un autre de l'histoire cette montagne.

Tur Abdin signifie littéralement "la montagne des serviteurs de Dieu", en référence aux moines qui vécurent dans les quelque centaines de monastères fondés dans la région après le quatrième siècle. D'autres régions aussi connurent un essor monastique. Au 5ème siècle, il y avait 300 monastères dans la montagne d'Urhoy (Edesse), hébergeant près de 90.000 moines. Dans le monastère de Saint Mathieu (Mor Mattai) à l'est de Mossoul, il y avait 12.000 moines. Au siècle suivant, le nombre de moines dans le monastère de Mar Basos près de Homs en Syrie atteignait 6.300. Il est admis que le nombre de moines et de nonnes syriennes pendant cet âge d'or atteignit le nombre fabuleux de 600.000. Parmi les moines et les ermites syriens les plus célèbres, on trouve : Saint Mathieu l'ermite, Saint Jacob de Nisibe, Saint Barsoumo et Saint Siméon le Stylite.

Quand le monachisme a surgi au quatrième siècle en Mésopotamie, la région était un lieu idéal pour y implanter des monastères. Elle était au cœur d'un carrefour militaire et culturel stratégique, mais assez à l'extérieur pour satisfaire au besoin de solitude des moines. De même, elle était assez proche de Nisibe, un important foyer chrétien, mais assez loin pour permettre à des moines d'y mener une vie monastique dans une paix relative. Cette position stratégique valut aux moines d'être courtisés par les différents empereurs et de tirer financièrement bénéfice de généreux cadeaux pour la construction et l'embellissement des monastères.

Tur Abdin - Berceau des Syriaques orthodoxes             

Nous les Syriaques sommes très fiers de nos racines et de notre patrie d'origine, c'est pourquoi notre communauté syriaque orthodoxe Mor Severios a eu l’immense plaisir de vous convier à une soirée cinéma sur le Tur Abdin et sur la restauration du sanctuaire du monastère Mor Gabriel (vendredi 5 février 2016).

Ce film consacré à notre patrimoine syriaque orthodoxe, a été réalisé par M. Jean-Claude Luyat (réalisateur) sous l'initiative de M. le professeur Alain Desreumaux (CNRS).
La projection du film a eu lieu dans  notre église Mor Severios à Coubron.

Souvenir vidéo et photos de cette soirée cinéma